Bouddhisme et mariage : comment concilier spiritualité et éthique ?

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Coucou mes noisettes, je vous retrouve aujourd’hui avec un article que vous m’avez largement demandé, à savoir quelle représentation le mariage a chez les bouddhistes ? En quoi le fait que je sois bouddhiste influence l’organisation de notre mariage ?

Pour celles qui ne le sauraient pas, je suis bouddhiste et pratique le bouddhisme Zen Soto pendant des séances de méditation zen (zazen) en temple, en retraite, comme en pleine nature, lors de randonnées méditatives. Et je suis aussi sur le point de me marier en février prochain. Effectivement, mes convictions bouddhistes ont largement, je crois, contribué à orienter l’organisation du mariage. Dans la mesure où notre mode de vie quotidien est une expression de nos convictions, il était assez logique finalement que notre mariage respecte ce mode de vie et ces convictions.

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Comprendre quelques bases du bouddhisme zen

Parce que la conception du mariage chez les bouddhistes est très singulière par rapport aux autres religions et afin de réellement comprendre l’état d’esprit de tout cela, il me semble essentiel de vous expliquer quelques bases du bouddhisme, notamment en ce qui concerne l’éthique.

La question de la moralité : éthique naturelle ou héritage ?

Pour parler juste et vous expliquer pleinement ma réflexion, il faut que je vous parle du terme « Sila », qu’on pourrait traduire littéralement par « droiture », mais qu’il faut peut-être plutôt entendre en français dans le sens de « vivre avec éthique« .

Il s’agit d’essayer d’atteindre une moralité plus naturelle, plus proche des réalités de la vie et de nos expériences humaines. Il faut bien distinguer la moralité naturelle et la moralité conventionnelle. La moralité naturelle correspond à une éthique pure de tout héritage (protéger le vivant par exemple). La moralité conventionnelle, elle, est issue d’un héritage : le pêché de l’homosexualité, la virginité de la femme, la monogamie, tout cela représente un héritage historico-social qui a mis en place progressivement cette morale conventionnelle. C’est comme le fait « d’ôter son chapeau quand on entre dans un endroit sacré ». Le « sentiment de respect » est une question de moralité naturelle mais son expression (par exemple par le retrait du chapeau) sera lié surtout essentiellement à la moralité conventionnelle. Les deux peuvent être donc liées parfois, mais il faut bien comprendre que le Sila bouddhiste ne se comprend pas à travers la tradition mais bien davantage par ses valeurs morale naturelles. Ainsi, il existe aussi bien évidemment des conventions en bouddhisme, une sorte d’héritage traditionnel en temple, en particulier ceux pratiqués par les moines, qui n’ont rien à voir avec la moralité naturelle. Finalement, qu’un moine porte une robe jaune ou orange, se rase la tête ou non, n’est qu’une question de convention et cela n’a rien à voir avec la « droiture morale », le « Sila ».

La moralité en soi et non la moralité sociale

Il n’est pas rare que j’entende autour de moi des personnes culpabiliser par non respect d’une valeur issue de la moralité conventionnelle. La culpabilité est d’autant plus grande si la société attache une grande importance à ces questions, les confondant presque à une moralité naturelle. Par exemple, dans notre société occidentale, la valeur « travail » est érigée depuis toujours comme essentielle, travailler est considéré comme « moral », il serait donc immoral de ne pas travailler. Le travail est tellement moral dans notre société qu’il s’agit d’une des premières questions posées lors d’une rencontre, « tu fais quoi dans la vie ? » (dans le sens de « quel est ton travail ? »). Ainsi, les personnes n’ayant pas d’emploi rémunéré sont socialement considérées comme un peu immorales. Il n’est pas rare de voir des retraités, femmes au foyer ou chômeurs, se sentir coupables, comme s’ils avaient fait quelque chose de mal, alors qu’ils n’ont causé aucune offense à la moralité naturelle, mais sont seulement allés à l’encontre de certaines coutumes et convenances. Pourtant, le non respect des convenances n’a strictement aucune incidence sur le karma. Par exemple, il est tout à fait possible d’avoir un travail qui n’est pas moral. Il est donc possible de convenir à la moralité conventionnelle mais d’être très loin de la moralité naturelle. Or, seules les questions de moralité naturelle ont un rapport direct avec le karma. Il est important d’être sûr à l’intérieur de soi-même qu’on mène une vie éthique et que l’on ne fait pas que respecter les préjugés de notre groupe d’appartenance. Vivre une vie éthique, c’est donc d’abord un état d’esprit sain, qui s’exprime par un comportement, des paroles et des pensées saines. Ainsi, seuls les préceptes de la moralité naturelle sont essentiels car ils nous éloignent  de l’avidité, de l’aversion et de l’ignorance. Ils nous encouragent au contraire à faire des actions positives basées sur l’altruisme, l’amour et la sagesse.

Être bouddhiste, respecter la moralité naturelle

Il existe 5 préceptes bouddhistes pour respecter la moralité naturelle et avoir une vie éthique. Lorsqu’on souhaite être bouddhiste, il faut chercher à appliquer ces préceptes dans son quotidien et dans toutes les étapes de sa vie. Ces 5 préceptes sont :

  1. Ne pas prendre la vie
  2. Ne pas prendre ce qui n’est pas donné
  3. Ne pas s’adonner à la méconduite sexuelle
  4. L’importance de la vérité et de ne pas mentir
  5. Ne pas intoxiquer son corps

Par incidence, ces préceptes orientent vers un mode de vie non-violent et bienveillant.

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La cérémonie du mariage bouddhiste

Dans le bouddhisme, la conception du mariage est bien différente de la conception occidentale traditionnelle. Il n’existe pas de cérémonie, de sacrement religieux ou encore de contrat légal. Le mariage est plutôt considéré comme une relation humaine sincère entre deux personnes qui va être reconnue par les amis et la famille. Dés lors, aucune cérémonie à proprement parlée n’est nécessaire pour unir un couple. Ceux qui le souhaitent peuvent organiser une fête pour les amis et la famille, afin d’annoncer officiellement la vie commune.

Par ailleurs, il est bien sûr possible, comme n’importe quel autre jour, d’aller au temple pour demander une « bénédiction ». Toutefois, ce n’est pas une cérémonie de mariage, ni un passage obligatoire pour être reconnu dans sa pratique. Il faut bien comprendre que le bouddhisme fonctionne très différemment des religions monothéistes que nous côtoyons en Occident. À aucun moment un bouddhiste ne doit « rendre des comptes » à une entité supérieure, la seule personne à laquelle il doit répondre c’est lui-même, en domptant son égo.

C’est bien en cela qu’un couple « non marié » n’est pas considéré comme vivant ‘dans le péché », illégalement ou de façon non-conventionnelle. Puisque le mariage bouddhiste est avant tout la relation elle-même, le fait de vivre ensemble heureux. Ainsi, si le choix est fait d’aller demander une bénédiction en temple, les moines la donnant ne créent pas le mariage, ils le reconnaissent, comme l’auraient fait leurs proches. La bénédiction sera donc que le couple vive heureux, en accord avec l’esprit du Dharma en s’aidant mutuellement sur leur chemin spirituel à pratiquer les enseignements du Bouddha pour atteindre leur éveil.

De même, il n’y a pas de difficulté à dissoudre le mariage, si le couple n’est plus heureux il se séparent et cela est bien suffisant pour signifier la fin de l’union. D’ailleurs, si un couple n’est pas en harmonie ou qu’un membre ressent une souffrance, le bouddhisme considère qu’il n’existe pas d’union et de mariage. Le bouddhisme admet d’ailleurs non seulement la monogamie (un couple de deux personnes), mais aussi la polygamie (Système social dans lequel une personne peut contracter simultanément plusieurs unions légitimes si tout le monde ne ressens pas de souffrance) et la polyandrie (système ou une femme a plusieurs époux encore une fois si cela ne cause pas de souffrances). Bien-sûr depuis toujours le bouddhisme ne s’oppose pas au mariage homosexuels.

En gros vous l’aurez compris, le mariage bouddhiste est avant tout une union philosophique. Rien n’est interdit, et les invités ne sont obligés de rien. Le principal est d’être uni et en paix les uns avec les autres. Le mariage  bouddhiste dans le quotidien consistera à vivre ensemble en harmonie. En effet, en bouddhisme l’âme n’est pas une entité close sur elle-même, elle communie plutôt en harmonie avec le monde qui l’entoure, elle a une juste place dans cet Univers. La définition d’un couple marié est celle de deux êtres qui ont trouvé un écho spirituel mutuel et qui avancent de concert sur le chemin de l’éveil.

Les rituels du mariage bouddhiste

Les couleurs sont souvent symboliques dans le bouddhisme et le yoga (mais aussi en psychologie, je pourrais vous en parler pendant des heures!). On retrouve par exemple cette prévalence des couleurs dans les différents chakra, mais aussi dans les différents corps énergétiques (physique, éthérique, karmique, bouddhique…). Ainsi, lors d’un mariage bouddhiste, la fête s’illustre souvent par des couleurs pourpres et rouges qui vont être à la fois symbole de chance et de nouveaux départ mais aussi largement rattachées au chakra racine. Il n’est pas rare dans certaines branches du bouddhisme ou de l’hindouisme, que les mariés soient vêtus de robes rouges, de pétales, épices etc… Il existe différents rituels qui peuvent être mis en place, mais il s’agit bien là de moralité conventionnelle et rien n’a valeur de prescription « pour être bien marié ».

Il existe aussi des rituels de mariage qui correspondent complètement à la philosophie du bouddhisme. En voici deux, peu connus, mais qui me paraissent tout à fait adapter à une cérémonie de « mariage bouddhiste » :

Le rituel de la fleur de thé

Ce rituel reprend la cérémonie du thé nipponne. Cette dernière est une magnifique illustration d’actions en pleine conscience. Il s’agit de faire éclore une fleur de thé dans une théière en verre (afin de profiter de la beauté de l’éclosion) et de partager ce thé entre les époux ou encore avec le reste des invités. Une fleur de thé éclot après 5 à 8 minutes d’attente, cela laisse donc le temps pour lire un joli poème.

Le rituel des alliances chaudes

Ce rituel consiste à faire passer les alliances entre les mains de chaque invité jusqu’à l’échange d’alliances des mariés. Les proches vont ainsi réchauffer les alliances et les charger en énergies positives, en faisant des voeux.

Un mariage bouddhiste zen qui nous ressemble

Nous avons donc fait le choix de mélanger tout ce qui nous lie, car le principe du mariage bouddhiste est bien la célébration de l’union de deux âmes qui ont décidé de vibrer en harmonie.

Nous avons donc opté pour une cérémonie laïque entourée de nos proches, avec différents rituels, des lectures de textes inspirants et des moments de partage. Tout le long de notre organisation, nous essayons autant que possible de limiter notre impact écologique afin de réaliser un mariage qui s’inscrit au mieux dans le « Sila » d’une vie éthique. J’espère, en partageant nos différentes trouvailles et avancées vers le mariage, montrer qu’il existe une autre voie plus responsable et minimaliste, plutôt que celle consumériste socialement mise en avant.

C’est là pour moi, à travers cette conception du mariage qu’on observe le plus clairement la distinction entre morale conventionnelle et morale naturelle.

Est-ce le choix d’une union de deux être liés par l’amour ? Ou bien un héritage traditionnel ?

Avons-nous besoin d’une borne à selfies ? D’une robe de créateur à plus de 1000€ ? Ou seulement de la présence de nos proches ? De leurs amour et leur yeux complices ?

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Voilà mes noisettes, j’espère avoir répondu à vos diverses interrogations sur le rapport entre bouddhisme et mariage. Cette conception est la mienne et bien-sûr elle n’engage que moi et ce que j’ai appris à travers ma pratique et les enseignements que j’ai eu. Je ne suis pas moine, je ne suis pas habilitée à transmettre les enseignements de Bouddha. J’ai tenté de vous partager mes perceptions sur ces questions par le cheminement spirituel que j’ai pu avoir, j’espère que cela vous éclairera un peu.

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Mariage et bouddhisme

5 petits mots pour “Bouddhisme et mariage : comment concilier spiritualité et éthique ?

  • Répondre PATRICK BALLOT 20 avril 2022 at 22 h 03 min

    C’ est super la libre réflexion dans le bouddhisme qui permet un réel cheminement puis une réelle réalisation. A deux j’ ai toujours pas trouvé .
    Belle vie à toi. Patri ck

  • Répondre acb 10 septembre 2021 at 9 h 55 min

    Merci beaucoup pour ce partage de réflexions, qui me rejoint tout particulièrement dans la préparation de notre mariage dans le sens conventionnel 😉 ainsi que tous les articles sur un mariage éco-responsable qui me font me sentir moins seule dans mes recherches et réflexions 🙂

  • Répondre Jerome K 29 mars 2020 at 10 h 19 min

    Et bien c’est confirmé, vos articles sont aussi qualitatifs que pertinents, vive le bouddhisme, vive la mariée 🙂

  • Répondre Laurie 20 septembre 2019 at 7 h 44 min

    Bonjour Lucile,
    Tout d’abord merci pour cet article inspirant !
    Je voudrais savoir si tu avais des livres a me conseiller sur le Bouddhisme ?
    Merci merci!

  • Répondre stephanie 17 septembre 2019 at 12 h 03 min

    et bien c’était très intéressant!
    Merci pour ce partage.
    j’aime énormément la symbolique des alliances chaudes. très beau!

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